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FULGURANCES D’APRÈS SILENCE

désillusion

Nous considèrent-elles comme horriblement décadents, ces très nombreuses femmes enfoulardées de noir qui s’empâtent de petits déjeuners coûtant l’euro symbolique dans le resto d’Ikea de ma capitale (self-service qui, hier, m’a fait penser à une sorte de resto du cœur, tellement le public y respirait le dénuement), ces mères sans séduction qui vivent dans un autre monde, qui ne nous voient pas, qui devisent entre elles tout en promenant entre deux tasses de café gratuites leur marmaille dans les couloirs de ce labyrinthe dédié à la consommation petite-bourgeoise?

Ce n’est pas cloisonné comme cela que je voyais notre monde dans le futur, quand j’arpentais nos villes multiculturelles dans les années 70. Les manifestations extérieures claniques y étaient rarissimes et j’y avais des amis de toutes convictions; et en voyage j’étais même reçu dans les mosquées pour les offices, de Karamanli (sans point sur le i) à Ambon en passant par Batu Ferringi (au nouvel an 1977, un samedi). L’islam était l’ouverture même et les étrangers sur certaines de ses terres, les envoyés de Dieu. Rien que pour faire plaisir à nos hôtes, qui se disaient nos frères, on se serait bien converti.

Qu’est-il advenu de ce monde? Pourquoi s'est-il ainsi radicalisé? Est-ce parce que nous n’avons pas suffisamment chouchouté ces immigrés quand ils nous étaient utiles et que nous les payions pour leur sueur et leurs larmes que leurs femmes nous regardent aujourd’hui sans nous voir? Est-ce eux qui ont changé ou est-ce moi qui ai vieilli et perdu le feu sacré de la jeunesse qui me faisait aller vers l’autre et recevoir au centuple sa sympathie en retour? Et surtout, surtout, puis-je encore vivre en paix avec tout ce mépris à ma porte?

Bref, cette visite à Ikea, hier, m’a laissé un goût amer, le goût de ma première intolérance, et ces questions ont perturbé la méditation du matin, interdisant le silence.

Je me devais, me semble-t-il de vous faire part de mon désarroi, même si vous êtes habitués à des billets moins pitoyablement personnels sur ce blog.

 

 

 

P.S.: Le billet du 11 décembre 2009 vous parlait de rapprochement

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À propos
Marc

Photographe, écrivain, sophrologue et enseignant de raja yoga, j’ai bourlingué des années en Asie et vécu longtemps dans des ashrams indiens. Lecteur de toutes les philosophies et amoureux de tous les silences, je vous livre ici mes fulgurances d’après ... silence.
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P
<br /> Bonjour Marc,<br /> <br /> <br /> Il est vrai que cet article, écrit par vous, me surprend. Une surprise peut-être équivalente à la vôtre et que vous avez sans doute voulu partager par honnêteté intellectuelle. En fait, je pense<br /> que vous avez réagi par projection d'une révolte personnelle. Comme j'aurais eu envie de déchirer une robe coûtant plus de 30.000€, un infini rejoignant le vôtre. Tout cela nous parait<br /> tellement injuste à la lumière de notre lanterne qui n'éclaire qu'en vision zoomée !  <br /> <br /> <br /> Seule la bienveillance à l'égard de tout "malade de la Vie", comme nous le sommes aussi, peut nous permettre d'approcher, épisodiquement, une vision panoramique réconfortante.<br /> <br /> <br /> Françoise<br />
Répondre
M
<br /> <br /> La bienveillance, quel bien beau sentiment, chère Françoise. Je le considère comme le plus approprié pour une vie juste sur la liste des quatre "exempts de limite". Mais qu'il est difficile à mettre en pratique devant la bêtise grandissante<br /> du monde!<br /> <br /> <br /> Amitiés,<br /> <br /> <br /> Marc<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Permettez, Marc, que pour une fois je sorte de ma réserve : si je vous ai bien lu, cela me gêne que vous qualifiiez de pitoyable votre témoignage personnel. Il me semble au contraire que nos<br /> réactions spontanées relèvent le plus souvent de l'universel, et je ne vois pas du tout en quoi ce qui est seulement humain serait nécessairement pitoyable.<br /> <br /> <br /> N'est ce pas plutôt la situation (dont on peut se demander si elle n'est pas volontairement produite, et à quelle fin ?) que vous décrivez qui l'est et qui fait problème ? de même notre époque si<br /> complexe, si "pitoyablement" tendue et nouée, si difficile à dénouer aussi.En ce sens, je ressens de façon très aigüe la même chose que vous. Peut-être que je me trompe mais les turbulences<br /> actuelles (écologiques, certes, mais pas que !) me semblent sans précédent.<br /> <br /> <br /> L'un de mes fils a été sommé (sic) de se convertir pour pouvoir épouser une jeune fille musulmanne d'un pays musulman où il séjourne près d'elle depuis 20 ans maintenant. Ce fut pour moi une<br /> expérience quasi initiatique, inoubliable en tout cas, que d'aller à cet étrange mariage où la famille de la jeune fille - en dépit de ses réticences connues et manifestes - nous a si<br /> merveilleusement, si aimablement et si généreusement reçus dans leur propre maison et pour plusieurs jours. De même je dois dire que j'ai été émue aux larmes que la maman de ma belle fille soit<br /> venue en France cette année pour m'offrir un très joli châle qu'elle avait rapporté de son tout récent voyage à la Mecque.<br /> <br /> <br /> Même si j'ai comme vous beaucoup de mal à endurer ce qui se laisse voir dans nos rues d'une bien réelle ségragation qui ne dit pas son nom, dont je participe certainement aussi, il me semble que<br /> toute occasion de dialogue et d'échange révèle et manifeste que nous sommes vraiment tous pareillement humains, que nous pouvons communiquer - même sans parler du tout la même langue - et,<br /> personnellement cela me réconforte toujours de le constater. Surtout, cela me dit qu'il faut saisir - essayer de saisir - absolument toute occasion de sortir de l'anonymat - et donc des<br /> généralisations trop faciles, et donc de tous les préjugés qui traversent notre temps ! - qu'il faut vouloir et effectivement rencontrer - vraiment rencontrer - l'autre qui, sinon, fait<br /> peur et qui déroute si facilement quand on ne le connait pas et en faire un ami, une vraie relation d'être unique et singulier à être unique singulier. Lui donner un nom propre et en recevoir un<br /> soi-même en retour. C'est tellement magique et bon d'en faire l'expérience !<br /> <br /> <br /> Pardon d'envoyer un si long message : vous abordez là un sujet qui me tient beaucoup à coeur, et depuis longtemps. Je ne sais même pas si tout cela est bien dans l'esprit du blog (je ne serai pas<br /> vexée que vous le fassiez disparaître si tel est le cas !). Bien amicalement.<br />
Répondre
M
<br /> <br /> Merci beaucoup, Camomille, pour ce long et beau commentaire.Je pourrais faire mienne chacune de vos paroles, et en rajouter serait superflu.<br /> <br /> <br /> Quant à le supprimer, je pense que que ce serait bien dommage. J'espère plutôt que beaucoup de mes lecteurs vous liront aussi et que, comme moi, ils tireront parti de vos conseils et de<br /> votre tolérance lucide.<br /> <br /> <br /> Amitiés,<br /> <br /> <br /> Marc<br /> <br /> <br /> <br />