encouragement

Quand on envisage les Yoga Sutra de Patanjali de façon ésotérique* c’est-à-dire sous leur aspect métaphysique (raja yoga, ashtanga yoga, appelé aussi yoga classique) plutôt que pratique* (un peu plus quand même que le shadanga yoga à destination d’un public adepte du « new age » ou du « feel good » et théorisé** par des pratiquants du dimanche n’ayant jamais goûté à l’ineffable magie de l’Inde du sacré), le fossé séparant l’Esprit (Purusha) du monde manifesté (prakriti) n’est pas aussi profond qu’il n’y paraît à première vue dans ce texte fondamental (mais difficile car interprétable à l’infini) de la spiritualité mondiale. 

Purusha n’est sans doute pas inatteignable par la matière (excepté dans certains états où celle-ci, purifiée, touche à l’Esprit, comme le suggèrent effectivement les Yoga Sutra), mais peut être aussi assimilé à l’Atman, l’autre « aspect » de Brahman, la Réalité Ultime du vedanta (et mieux encore appréhendée dans l’advaïta vedanta), ce que Patanjali nous incite peut-être en réalité à découvrir grâce la pratique qu’il nous propose, et qui se révèle lorsque le yogi, dans « la solitude extatique de la vision » (kaivalya) touche au but, but dont il se rend compte à la fois qu’il l’a atteint depuis toujours, et pourtant (et c’est un paradoxe insupportable pour un esprit exclusivement rationnel) qu’il n’aurait pu y accéder sans sa recherche. Il n’y alors plus d’Esprit et de monde manifesté différent de Lui, il n’y plus que Brahman.

* : Aspect ésotérique : description d’une état. Aspect exotérique : mode d’emploi.

** : Gurdjieff décrit ainsi férocement ainsi les ouvrages descriptifs : « Les ouvrages de ce genre sont généralement écrits par des gens qui ne sont jamais allés nulle part et n’ont par conséquent jamais rien vu de réel, bref des gens qui comme on dit, ne sont jamais sortis de leur cabinet. » (Rencontres avec des hommes remarquables, G.I. Gurdjieff, Rocher/Littérature, Paris, 1984, p. 30)

P.S. : Dans le billet du 2 mars 2018 il était question d’une analogie.