lucidité

Dans ses moments les plus lucides, le méditant déplore amèrement trop ignorer encore qu’il ne sait rien. Il pressent qu’il est loin de la sagesse d’un Socrate, telle que Platon la relate. Cependant, il tend quand même de façon générale vers la conscience de sa propre ignorance. Est-ce cela qui le rapproche de la lucidité ? Forcément il ne peut le savoir car cette certitude de savoir ne serait sans doute ( ?) rien d’autre qu’une autre manifestation de son ignorance.

L’ignorance, la vraie, celle dont on parle ici, voilà peut-être le point central. Les hindous pensent d’ailleurs que c’est la cause première de la souffrance (alors que les bouddhistes pensent que c’est le désir qui est le coupable, mais cela revient au même puisque le désir est le fait de l’ego ignorant son propre caractère illusoire).

Tout ceci m’est venu à l’esprit en lisant dans la presse cette magnifique phrase : « Rien de plus dangereux que l’ignorance de sa propre ignorance. » (On parlait de croyances particulièrement étonnantes, celles des mohamedans).

Certes, le sceptique est loin de ces convictions-là qui laissent pantois, mais de là à dire que parce qu’il doute de tout, il est, lui, plus proche de la vérité, il y a un pont qu’il doit se garder de franchir sous peine de verser lui aussi dans une autre ahurissante certitude. Toujours douter, voilà peut-être la moins mauvaise de toutes les lignes de conduite. Et je dis bien « peut-être ». « Peut-être devrait peut-être être le mot le plus employé du langage », je l’ai dit maintes fois dans mes écrits, sans d’ailleurs toujours m’écouter au moment de prendre la plume. Douloureuse constatation!

P. S. : Dans le billet du 7 octobre 2016 il était question d’une émouvante évocation.